Un bouquet de pivoines à la main, Émilie et Sarah attendent devant la mairie. Dans leurs yeux, une impatience vibrante se mêle à une incrédulité discrète : il aurait suffi de remonter dix ans en arrière pour que cette scène relève de l’impossible.
Leur histoire, ni tout à fait singulière ni vraiment ordinaire, fait désormais partie du paysage légal français. Derrière le décor de fête et les éclats de rire, un chemin administratif rigoureux se dessine, fait d’étapes parfois insoupçonnées. Qui, aujourd’hui, peut vraiment se marier ainsi ? Quelles subtilités juridiques faut-il déjouer ? Même les fiancées les plus aguerries découvrent parfois, au détour d’un guichet, des règles moins évidentes qu’il n’y paraît.
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Le mariage entre femmes en France : où en est la loi aujourd’hui ?
Depuis 2013, la France a réécrit son code civil pour ouvrir grand la porte au mariage entre personnes de même sexe. La loi Taubira, fruit de débats passionnés, a marqué un tournant décisif pour l’égalité femmes-hommes. Après validation du Conseil constitutionnel, le droit pour deux femmes de s’unir est entré de plain-pied dans la législation.
L’article 143 du code civil affiche désormais sans détour : « Le mariage peut être contracté par deux personnes de sexe différent ou de même sexe. » Plus d’équivoque possible : la France a rejoint le cercle des pays européens qui ont ouvert le mariage à tous les couples, sans distinction de genre.
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Les conséquences juridiques du mariage entre femmes sont identiques à celles d’un couple homme-femme : succession, filiation, choix du régime matrimonial… rien ne diffère. Seul le mariage civil, célébré en mairie, a une existence légale ; la cérémonie religieuse, elle, reste un symbole privé qui n’a pas d’effet devant l’État.
- Code civil actualisé : l’accès au mariage civil se fait aujourd’hui dans les mêmes conditions pour toutes, sans considération de sexe.
- Égalité des droits : couverture sociale, fiscalité, parentalité, succession… Les épouses disposent exactement des mêmes droits qu’un couple hétérosexuel.
La ligne française ne vacille pas : le mariage entre femmes est pleinement intégré au droit commun, sans régime à part ni procédure spéciale.
Quelles conditions faut-il remplir pour se marier entre femmes ?
Plus de distinction entre mariage hétérosexuel et mariage entre femmes : la loi s’applique à toutes selon les mêmes critères.
La pierre angulaire, c’est le consentement : chacune doit manifester sa volonté, sans pression ni contrainte. La majorité est requise : seules les personnes de 18 ans ou plus peuvent se marier, sauf exception rarissime accordée par le procureur, typiquement en cas de grossesse.
- Célibat : aucune union possible si l’une des deux est déjà mariée, en France comme à l’étranger. La bigamie et la polygamie demeurent interdites.
- Parenté prohibée : le code civil bloque tout mariage entre proches : ascendants, descendants, frères, sœurs, même demi-frères et demi-sœurs.
Frauder l’état civil ou contracter un mariage blanc expose à des sanctions lourdes. Les autorités examinent les dossiers à la loupe, vérifient que la démarche n’est pas motivée par l’obtention d’un titre de séjour ou toute autre raison purement administrative.
Si l’une des futures épouses n’a pas la nationalité française, la loi de son pays entre aussi en jeu. Certaines législations étrangères refusent encore le mariage entre personnes de même sexe. Pourtant, la France, invoquant l’ordre public, permet souvent l’union sur son territoire, même en cas d’interdiction dans le pays d’origine.
Le socle reste le même pour toutes : égalité, liberté de choix, respect de l’ordre public — sans la moindre distinction selon le genre.
Procédure légale : étapes clés et documents indispensables
En France, le mariage civil est la seule union reconnue par la loi. Peu importe le couple : femmes, hommes, ou mixte, la cérémonie se tient devant l’officier d’état civil dans la commune où réside l’une des deux. Le mariage religieux peut suivre, mais il reste dénué d’effet légal.
Avant la cérémonie, un passage obligé : la publication des bans. Pendant dix jours, l’annonce du mariage s’affiche en mairie. Cette étape, inscrite dans le code civil, permet à toute personne de formuler une opposition officielle si un obstacle légal existe.
- Une pièce d’identité valide
- Un justificatif de domicile
- Des copies intégrales d’actes de naissance de moins de trois mois (ou six mois si la naissance a eu lieu à l’étranger)
- La liste des témoins : au moins deux, au plus quatre
Si l’une des futures mariées est étrangère, la liste s’allonge : certificat de coutume, de célibat, traduction officielle des actes. L’état civil passe chaque document au crible, s’assurant que tout est en règle.
Une fois la cérémonie terminée, l’union est consignée dans les registres de l’état civil. C’est cette inscription qui donne au mariage toute sa force juridique. La moindre faille administrative peut mener à l’annulation, d’où l’importance de soigner rigoureusement chaque étape.
Cas particuliers et questions fréquentes sur le mariage entre femmes
Nationalité, titre de séjour et droits au séjour
Le mariage entre femmes offre les mêmes droits de séjour qu’un mariage hétérosexuel. Une épouse étrangère peut déposer une demande de carte de séjour “vie privée et familiale” après l’union. Mais attention, le mariage n’ouvre pas d’office les portes de la nationalité française. Il faut compter quatre années de vie commune sur le territoire, avec à la clé, une bonne maîtrise de la langue et un casier judiciaire vierge.
Régime matrimonial, adoption et parentalité
Le choix du régime matrimonial se fait dès la préparation du dossier : la communauté réduite aux acquêts s’applique par défaut, mais il reste possible de signer un contrat devant notaire. Le désir d’enfant, lui, prend une place centrale. Grâce à l’ouverture de la PMA à toutes les femmes, chaque épouse peut porter l’enfant, et la filiation maternelle est reconnue pour la conjointe via une déclaration conjointe en mairie.
- Pour une adoption conjointe, le mariage est exigé pour adopter ensemble un enfant.
- L’autorité parentale conjointe s’applique automatiquement aux enfants nés ou adoptés pendant le mariage.
Séparation, divorce et conséquences juridiques
Le divorce par consentement mutuel est accessible à tous les couples mariés, sans distinction de sexe. Moins fréquent, la séparation de corps permet de rester liées légalement tout en menant des vies séparées, certains droits étant maintenus. Partage des biens, pension alimentaire, résidence des enfants : tout s’applique à l’identique, qu’il s’agisse d’un couple de femmes ou non.
Aujourd’hui, les portes de la mairie s’ouvrent sans distinction. Le chemin peut sembler balisé, mais chaque histoire, chaque union, donne chair à une liberté conquise. Le droit, lui, continue d’avancer, porté par ces bouquets de pivoines et par l’irrépressible envie de dire « oui ».